jeudi 13 novembre 2008

Ah Dieu ! que la guerre est jolie

Ah Dieu ! que la guerre est jolie 
Avec ses chants ses longs loisirs
Cette bague je l’ai polie
Le vent se mêle à vos soupirs
.
Adieu ! voici le boute-selle
Il disparut dans un tournant
Et mourut là-bas tandis qu'elle
Riait au destin surprenant

Guillaume Apollinaire(1880 - 1918)

"J'ai tant aimé les Arts que je suis artilleur" écrivait Guillaume
"Il y a des hommes dans le monde qui n'ont jamais été à la guerre" écrivait, compatissant, le poète, qui ajoutait : "Me voici libre et fier parmi mes compagnons".
Guillaume, depuis les tranchées à une femme aimée :
" Effrayante monotonie d'une vie d'où l'eau, même l'eau non potable est absente.
O pures tranchées comme des lys qui fleurissent en terre au lieu de fleurir vers le ciel.
C'est la terre même qui fleurit. "
Mais c'est dans ce poème tout simplement intitulé Guerre qu'Apollinaire donnera la pleine mesure de son incomparable génie :

"Ne pleurez donc pas sur les horreurs de la guerre
Avant elle nous n'avions que la surface
De la terre et des mers
Après elle nous aurons les abîmes
Le sous-sol et l'espace aviatique
Maîtres du timon
Après après

Nous prendrons toutes les joies
Des vainqueurs qui se délassent
Femmes Jeux Usines Commerce
Industrie Agriculture Métal
Feu Cristal Vitesse
Voix Regard Tact à part
Et ensemble dans le tact venu de loin
De plus loin encore
De l'Au-delà de cette terre"
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Le Poète est ici visionnaire.
Pourtant, tous les cuistres "commentateurs" de son oeuvre lui ont toujours cherché une querelle d'allemand pour n'avoir jamais parlé de la Grande Guerre de façon négative.
"La guerre est une chose charmante" écrivait Apollinaire à Sonia Delaunay, le 1er août 1915.
Ce rapport amoureux qu'a entretenu l'auteur d'Alcool avec la guerre, qui s'est engagé volontairement, et qui accepte joyeusement la discipline du soldat, désappointe au plus haut point les glossateurs petit-bourgeois suintant la moraline pacifiste et bêlante.
(De moraline antimilitariste et féministe pour être plus exact. Car nos modernes penseurs journalistiques ne sont plus à proprement parler des pacifistes. Ils veulent bien qu'il y ait des guerres. Même des guerres à l'uranium appauvrie. A condition qu'elles soient "humanitaires", pour le Bien, contre le Mal, les Serbes, les Irakiens et autres Talibans misogynes et homophobes.
Ils veulent bien qu'il y ait des boucheries, à condition qu'elles soient cashères, avec des serviettes hygiéniques de rechange dans le paquetage des "soldates", des Cheesburgers, du Coca Cola et surtout zérommor pour les vaillants mercenaires body-buildés mâles.
Toute la cohorte des Glucksman, des Goupil, Val, Courtois, Bruckner et autre Adler, qui sont physiquement et intellectuellement des lâches, sont des va-t-en guerre et de boutefeux hors pairs, mais avec la peau des autres... )
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L'ennui, pour nos commentateurs content-pour-rien, d'Appolinaire, c'est qu'ils ne sauraient nier le génie du poète. Ils veulent écouter leur cœur sangloter à l'unisson des glouglous de la Seine, sous le Pont Mirabeau, mais ils ne goûtent pas du tout le viril militarisme de Guillaume.
Donc pour sauver le meuble Apollinaire dans le bazar de la Culture, ils font intervenir l'inévitable psychologie des profondeurs : La Guerre comme rite de passage, permettant à Apollinaire de réaliser l'assomption de sa masculinité.
La protestation virile, quoi! On a dit la même chose pour Drieu.
Et après?
(à suivre)
Félix Niesche.

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