lundi 6 avril 2009

Max et son Ferrailleur

On connaît la fin tragique de la vie de Friedrich Nietzsche, l'effondrement suivi des onze années de maladie :
Le 3 janvier 1889, sur la place Carlo Alberto, à Turin, Nietzsche embrasse un cheval de fiacre qu'un cocher vient de frapper puis tombe sans connaissance.
Les jours suivants, il rédige ce que la Postérité nommera "les billets de la folie", adressés à des amis ou à des inconnus qu'il signe le plus souvent " Dionysos " ou " Le Crucifié ".
L'auteur de L'Antéchrist, se nommant Antéchrist lui-même, terrassé pour s'être identifié à un cheval martyrisé, avoir ressenti, été, ce que cette Bête ressentait, était, finit par se nommer "le Crucifié" !
Et qui écrira : " Je suis mort parce que je suis bête; je suis bête parce que je suis mort ".
Voilà qui doit faire penser.
Ramené à Bâle par son ami Overbeck, paralysé, il habitera désormais auprès de sa mère qui le soignera jusqu'à sa propre mort en 1897, ensuite à Weimar, dans la maison de sa sœur, dans de laquelle il mourra  le 25 août 1900.
On s'accorde généralement pour dire, qu'à partir de ce 3 janvier 1889  le philosophe au marteau est complètement marteau.
Telle n'est pas mon opinion.
Son état mental d'aiileurs semblant avoir été le sujet de maintes interprétations, de la folie pure jusqu'au simulacre prémédité.
Son ami musicien Heinrich Kôselitz Alias Peter Gast à l'époque même de son internement à Iéna écrivait : « Il me faisait l'effet de simuler la folie. »
Quand à Lou Salomé, qui avait eu une liaison avec le philosophe, elle avait une théorie selon laquelle « Nietzsche se fabriquait des masques de plus en plus déroutants, jusqu'à ce masque absolu de la folie où pour nous vérité et apparence tombent l'une en dehors de l'autre
À mon sens, la femme Salomé, une fois n'est pas coutume, touche ici quelque chose d'essentiel de Nietzsche.
De tous ces "billets de la folie", j'extrais celui ci, qui me parait étayer notre thèse :
" Me souviens que Max a écrit quelque chose comme : le peuple est l'opium du christianisme. Chez ce littérateur transformiste trop utopique [pour être] honnête, on trouve quand même quelques bonnes réflexions. "
.
A première vue, cela peut paraître complètement puéril et facétieux.
Il n'en est rien.
C'est profondément vu.
Démonstration :
S'il s'était agi d'une simple boutade, Nietzsche se serait contenté d'inverser les termes de l'apophtegme marxiste et aurait écrit : le peuple est l'opium de la religion, pour ironiser, sottement, comme en écrivant Max au lieu de Marx, n'est-ce-pas ?
Or Nietzsche écrit : le peuple est l'opium du Christianisme, ce qui est très différent et très exact.
Seule la compréhension Gnostique du Xstianisme, la seule véritable, révélée par la Gnose et les évangiles de Nag-Hammadi, peut donner corps à cette interprétation.
.Je m'explique :  
Se rendre accessible aux besoins de la masse de perdition, (car pour Nietzsche "peuple" est un concept flou, inconsistant, et Marx lui même rejetait ce terme naturaliste suranné plus proche de masse que de prolétariat), telle est l'essence de la religion nouvelle, dévoyée, dont Saint-Paul et toute la prétraille à sa suite furent les instigateurs.
Il s'est donc agi de dépouiller l'enseignement du Maître Jésus de sa véritable nature, qui est novatrice, aristo-cratique et ésotérique, s'adressant à la fois aux simples de coeur et à l'homme différencié, une Parole inimitable, l'invitant à une véritable métanoïa, transformation intérieure, pour atteindre le Royaume, ici et maintenant. Quitter les habits du vieil homme, répudier la morne norme du Vieux Monde, règne du Démiurge dans lequel "la vraie vie est absente".
Mais il ne faudrait pas entendre par là, qu'il s'agissait d'un enseignement intimiste et subjectiviste, valorisant le substrat irrationnel, "l'évasion" propre à une religiosité orientale et féminine. Au contraire Jésus nous invite à sortir de l'obscurcissement originel pour rejoindre le Soi intemporel, impersonnel, par delà et la vie et la mort, au delà de l'Être et du Néant.
On sait comment cet enseignement fut reçu...
.
Au rebours de l'enseignement de Jésus, pour asseoir son pouvoir temporel, la nouvelle caste sacerdotale a crée ce corpus doctrinaire exotérique, "démocratique", lié frauduleusement aux fables de l'Ancien Testament, dont le maître-mot est"croyance", au lieu d'éveil spirituel. Désormais, il faut avoir "la Foi". Croâ-croâre.
Culture de la monade, de l'isolement, de la séparation, de "l'absolutisation" de ce qui est particulier, elle flatte l'ego de chaque atome de la masse indifférenciée.
Que voilà un bon coup des Semi-habiles, se faisant passer pour des Spirituels aux yeux des Simples.
Chaque imbécile se voyant affublé d'une âme immortelle, espèce d'entéléchie de la personne, une âme à problèmes qui va de crise en crise et qui se "sauvera" en suivant les préceptes de la nouvelle vulgate si bien faite pour le vulgaire.
Le Xstianisme devint un patronage à base de péchés et de récompenses dans des arrières-mondes, des fictions pour enfants, un conte de Noël, des fumerolles, des fumées d'opium.
En ce sens la substance démonique de la plèbe fut nécessaire à la Nouvelle Croyance érigée par la nouvelle caste, le Peuple devenant réellement, l'OPIUM du Christianisme.

Marx ne manquait pas d'R.
Max devient dès lors LA menace a-maxima pour cette maxime de Marx, prise et comprise hors de son climax maximaliste et transformiste par le grand Friedrich Nietzsche.
Félix le chat.

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