mardi 24 janvier 2012

"Je hais l'émancipation de l'individu et celle des femmes."

Giacometti par Cartier-Bresson

Ibara, qui dit dans un entretien sur son blog, ne pas se considérer lui même comme un Hârtisse, cite comme grand Artiste : Giacometti.  Ça ne m’étonnes pas.
D’abord, se refuser soi-même à l’appellation d’artiste.
À « artiste », Littré donne deux définitions :
- substantif : « celui qui exerce un des beaux -arts »
- adjectif : « qui a le génie, le sentiment, le gout des arts… »
Ainsi un artiste peut se révéler bien peu artiste.
J’ai une amie ainsi faite. Artiste, elle exerce une profession des beaux arts, mais elle n’a aucune sensibilité, aucun discernement, pas le moindre génie d’art. Sa manière de voir est grossière et matérielle.
Aussi ses idées sont-elles grotesques et les œuvres issues de ces idées de grotesques figurines, infantiles, bêtes et lourdes mais elle les a polies avec finesse, avec savoir-faire et le soin que les anciens, qui furent soit disant nos pères, mettaient à bâtir Notre-Dame.
Je dirais elle n’est pas artiste mais elle est talentueuse. 
Étrange impression, inimitable.

Aujourd’hui l’adjectif s’emploie comme substantif , une faute de grammaire autant que d’esprit, mais toute faute d’intelligence ne se traduit elle pas en faute de grammaire ou de style ?
Le substantif nous l’appellerons l’Hârtisse. Pour la clarté.
"Je suis un Hârtisse", sous entendu un Génie, ou pour le moins un être à part, dont le domaine est l’ART, qui vit dans le monde de l’Art, et j’ai le look artiste.  Mais dans le même temps on dit de l’œuvre qu’elle doit sortir des tripes : de la merde donc, et ses producteurs des merdeuses et des merdeux.

Ibara qui sait intuitivement la nuance, pense qu’on peut être peintre, sculpteur, romancier, pamphlétaire, poète ou tout ça à la fois, quant à être né artiste, comme Giacometti, comme on peut-être né philistin comme Adler, c’est une autre paire de couilles. C'est rare et presque "baroque" comme Ibara. 
D’autant que maintenant ce sont les philistins qui peignent, écrivent, sculptent.   Hartisse, nous laisserons donc cette appellation aux « comédiens », aux zacteurs, aux pitres, aux rappeurs, aux écrivaines, voire aux fouteballeurs, et autres furonculoses de cette élite post moderne virtuose à jamais dépourvu d’art, de talent, de finesse. 
Dans les grottes, à Lascaux,  ce n’est pas eux qui aurait eu l’idée des fresques sur les parois. Et comme ils ne savaient pas chasser non plus, ce sont ceux là qui attendaient dans l’ombre l’heure des rogatons.
Aujourd’hui, le Retournement involutoire étant parfait, ces Untermench exhibent les rogatons qui sortent de leurs cabinets de travail : c’est la littérature, ou l’Art contemporain; de même la Politique, dégradée en activité d’attachée de presse ou d’avocat d’affaires.
Dénaturation des Hautes Disciplines. Elles sont disparues, ne subsistant à l’état fragmentaire que chez quelques hommes libres.
La tradition a commencée d’être tarée bien avant l’époque présente, mais longtemps on gardait encore le culte, ou le semblant du culte, de l’exécution soignée, le gout matériel de l’ouvrage bien fait, de l’apprentissage, et du savoir-faire.
Aujourd’hui tout est mort, la sous humanité actuelle, en voie de ressingeation, spirituellement invertie, vouée à la mort et qui porte le Signe de la Mort, par sa décomposition morale et spirituelle, ne sait plus que souiller les anciennes Œuvres, en traçant dessus les tags de sa pourriture. Comme des vers "travaillent" un cadavre et le colorient.
Ne reste de vivace que la superstition du « Talent », néant sonore, qui emplit de vents les intestins qui pètent plus haut que leurs culs. 
Ce qui est une excuse pour les nouvelles impostures : on produit des œuvres de merde mais on les fait merdeusement.

***

Ce goût d’Ibara pour Giacometti ne me surprend pas, mais pour une autre raison.
En dehors d’une certaine filiation picturale que j’aperçois, il en est une autre, plus idéologique, si l’on peut dire. Je n’irai certainement pas jusqu’à prétendre qu’Ibara signerait certains propos d’Alberto Giacometti qui ne laissent pas de me mettre en joie.

«  Je sais que je sympathise avec l'Eglise, avec le despotisme religieux. J'ai raison ou tort ? Je crois avoir raison, mais j'en ai pas la certitude. J'ai de l'antipathie pour la philosophie, pour la liberté de pensée, pour la liberté d'action, la liberté d'écrire des livres, de faire des tableaux et d'exprimer des idées personnelles. Je hais la liberté de croyance et de non-croyance, et la république. Je hais l'émancipation de l'individu et celle des femmes. Je ne peux plus entendre tous les bavardages qu'on fait, que tous font sur toutes les choses, sur l'art, sur l'histoire, sur la philosophie, ou chacun croit pourvoir exprimer la misérable idée qu'il s'est faite dans son cerveau.
Pourquoi est-ce que l'Eglise ne brûle plus, ne torture, ne tue plus tous ceux qui osent penser ce qui leur plaît ? » Giacometti, Ecrits, ed. Hermann.

Il me souvient que la Pairie de Maris avait battu le rappel au Centre Pompon pour une exposition Giaccometti, annoncée à sons de trompettes.
Toute la boboaille s’y précipita, ravie d’être dans ce Pompidolium qui lui ressemble.
Qu’auraient ils dit, les pauvres si ces Ecrits que j'ai mentionné avaient été divulgués.
Sans doute auraient ils appelé la Police pour fermer cette expo comme repaire de la Bête immonde.

Felix Lechat

dimanche 15 janvier 2012

Lecteurs assis et assidus

Je prie tous mes fidèles lecteurs « mes semblables, mes frères », ma garde rapprochée :
l’Utile Nocif, Zig, et toi ma Puce, Causette, Antoine, Antan, Danny, Tonkin, là bas en l'Outre Mer, Landru dans l'outre-tombe, le grand Ibara, l’intermittente Orfeenix, Sextusempiricus, Robert8, Dromatoch, Seb et Sébastien, ainsi que l’ubiquitaire Brebis, et d’autres que j’oublie, et qui me pardonneront, tous mes commentateurs, je devrais dire mes collaborateurs, ainsi que la cohorte innombrable des anonymes, cybernautes de l'Univers (et au-delà), naviguant sur la toile et sous les étoiles divaguant;
de bien vouloir excuser cette absence de textes, cette carence de tirs de barrage, lors même que la Porcherie mitraille à balles réelles sur nos dernières tranchées, que l’actualité est comme autant de crachats puants sur nos durs visages pâles.

Mais je suis accablé de travail, besogne fastidieuse de logistique, je succombe sous le faix de la nécessité. Enchaîné par une tâche obscure, ingrate mais indispensable de « mise en œuvre », et qui devrait tantôt porter un fruit récoltable, dont j’espère partager avec vous le suc.

À plus tard, donc, si Dieu le veut, et que tous me veuillent absouldre.
Félix Lechat